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Comment le syndicat danois a-t-il obtenu le paiement intégral pour ses joueuses de la Coupe du monde féminine, en plus des dotations de la FIFA/FIFPRO

- Un montant total de 110 millions d’USD a été distribué par la FIFA aux joueuses de la Coupe du monde féminine en fonction de leurs performances lors de la compétition
- Au motif de ces dotations de la FIFA, la Fédération danoise de football a initialement refusé de verser ses propres dotations à ses joueuses, comme le stipule sa convention collective
- Michael Sahl Hansen, directeur général de Spillerforeningen, explique comment le syndicat danois a réussi à défier la fédération pour garantir aux joueuses de l’équipe nationale féminine de recevoir leur dû
Le syndicat danois Spillerforeningen a obtenu le paiement intégral des joueuses de l’équipe nationale féminine, comme le contemple leur convention collective, en plus de la somme prévue dans l’accord sur les dotations de la Coupe du monde féminine de la FIFA/FIFPRO.
La FIFA a distribué un montant total de 110 millions d’USD réparti entre les joueuses de la Coupe du monde féminine en fonction de leurs performances lors du mondial, chacune ayant reçu au moins 30 000 USD, et chaque joueuse espagnole, 270 000 USD pour avoir remporté la compétition. Le montant a été obtenu grâce à la plus grande action collective jamais entreprise par la FIFPRO, ses syndicats membres et plus de 150 joueuses internationales issues de 25 pays.
La participation du Danemark aux huitièmes de finale a permis aux 23 joueuses danoises de recevoir chacune une dotation de 60 000 USD de la part de la FIFA. Au motif que les joueuses recevaient déjà les paiements de la FIFA, la Fédération danoise de football (DBU) a initialement refusé de payer l’intégralité des dotations supplémentaires convenues dans la convention collective avec Spillerforeningen.
Cependant, le syndicat danois s’est battu sans relâche pour obtenir leur dû aux joueuses et a conclu plus tôt ce mois-ci un accord avec la DBU, permettant à ces joueuses de recevoir cent pour cent des dotations, comme le stipule leur convention collective. La FIFPRO s’est entretenue avec Michael Sahl Hansen, directeur général de Spillerforeningen, pour savoir comment le syndicat danois a réussi à obtenir leur dû aux joueuses de l’équipe nationale féminine.
Michael, pouvez-vous nous raconter comment vous en êtes arrivés là ?
Nous avons une convention collective avec la fédération qui stipule le montant que les joueurs recevront en dotations pour des compétitions tels que l’EURO et la Coupe du monde. Elle a été rédigée avant l’action collective qui a permis d’obtenir les dotations de la FIFA/FIFPRO pour les joueuses. Nous avons dit à la fédération que l’accord existant entre nous et la FA était bien sûr toujours d’actualité et qu’elle devait donc payer les dotations précédemment fixées dans la convention collective, en plus des dotations accordées par la FIFA. Au début, ils n’étaient pas d’accord avec nous. Ils nous ont fait savoir que les joueuses recevant des dotations de la FIFA, ils ne paieraient pas les sommes convenues dans la convention collective, en nous donnant des exemples d’autres fédérations nationales qui faisaient de même. Mais des montants avaient été fixés dans notre convention collective, et notre position était ferme sur le fait que les conditions convenues précédemment devaient s’ajouter aux dotations de la FIFA, d’autant que les joueuses pensaient la même chose.
C’était avant la Coupe du monde féminine, et une semaine avant le départ des joueuses pour l’Australie, la fédération a tenté de négocier un montant partiel. Nous avons clairement indiqué que les joueuses souhaitaient percevoir l’intégralité du montant convenu. Nous avons ensuite reporté les discussions pour après la compétition, car à ce moment-là, nous souhaitions donner de l’espace aux joueuses ; nous voulions qu’elles puissent se concentrer uniquement sur le football.

Comment avez-vous finalement résolu ce problème avec la fédération après la compétition ?
Nous avons clairement fait comprendre à la fédération que les dotations de la FIFA/FIFPRO n’avaient rien à voir avec eux : c’était de l’argent pour lequel les joueuses s’étaient battues et cet argent provenait de la FIFA. Nous avons également fait savoir à la fédération que grâce à cet accord, elle recevait davantage d’argent de la FIFA. Donc, si davantage d’investissements sont effectués dans la fédération, celle-ci est plus à même de payer les dotations précédemment stipulées dans la convention collective. En outre, ils avaient prévu le paiement de ces dotations aux joueuses dans leur budget avant de savoir que les dotations de la FIFA/FIFPRO allaient leur être versées, donc cela n’avait aucun sens de déduire l’argent de la convention collective.
Nous nous penchons également actuellement sur la convention collective masculine et, lors de ces réunions, la fédération a parlé d’égalité de rémunération. Donc, qu’ils refusent ensuite aux joueuses leur plein salaire, c’est plutôt contradictoire et cela ne donne pas une bonne image d’eux-mêmes. Nous avons également retourné certains arguments de la fédération contre eux. Par exemple, dans le passé, la fédération n’a pas voulu augmenter les dotations parce qu’elle a déclaré qu’il existait déjà un accord écrit. Eh bien justement, nous nous en tenions à cet accord écrit…

Quels conseils donneriez-vous aux autres syndicats qui pourraient vivre actuellement une situation similaire ?
Je pense que le meilleur conseil est de poser les chiffres sur la table. Les fédérations disent souvent qu’elles ont des budgets fermés, qu’elles ne peuvent pas investir plus d’argent. Pourtant, avant la Coupe du monde, ils avaient établi des budgets afin de déterminer le montant des dotations qu’ils pouvaient verser aux joueuses. Lorsque de nouveaux fonds arrivent de la FIFA alors même qu’ils n’étaient pas budgétisés, les fédérations sont davantage
en mesure de payer leur dû aux joueuses. Nous leur avons également dit que nous ne rendrions pas cela public pendant les négociations et que nous leur faisions confiance pour résoudre ce problème. Nous avions également le soutien des joueuses qui souhaitaient résoudre ce problème par le dialogue. Il est important que les syndicats membres se serrent les coudes et partagent leurs meilleures pratiques, car les fédérations collaborent à leur niveau. Lorsque nous remplissons le MDAS, nous devrions partager notre convention collective, car le fait de ne pas disposer d’une vue d’ensemble complète nous porte préjudice en tant que syndicats si les fédérations, elles, ont accès à toutes les informations. Cela diminue nos chances d’obtenir le meilleur accord pour les joueuses. Le fait que les fédérations ont davantage de connaissances en termes de conventions collectives, de paiements, etc., peut nous porter préjudice.
Quelle a été la réaction des joueuses depuis qu’elles ont reçu leur dû ?
Lorsque nous leur avons dit pour la première fois que la fédération refusait de payer, naturellement, elles n’étaient pas contentes. Mais elles voulaient résoudre ce problème en privé par le dialogue. Les joueuses ne voulaient plus faire grève. Les joueuses étaient contentes du résultat final, et elles étaient particulièrement satisfaites du travail accompli par la FIFPRO, les syndicats membres et les joueuses internationales afin d’obtenir de meilleures conditions pour la Coupe du monde.
Il s’agit d’un apprentissage continu, surtout pour les jeunes joueuses, qui ne savent peut-être pas grand-chose de ce que nous faisons en tant que syndicats. C’est l’occasion de montrer pourquoi nous sommes là pour elles et que nous pouvons atteindre nos objectifs lorsque nous travaillons ensemble.
